Accroc et papillon...8
Vendredi 7h09
La rue de la Raison Dialectique qu’il emprunte tous les jours est plus calme. Deux ouvriers réparent des joints de maçonnerie.
« Qu’est-ce qu’il y a derrière les murs ? leur demande Ernest.
- Mais rien. Rien du tout !
- Ce n’est pas possible ! Ernest s’énerve pour la première fois. Il y a forcément quelque chose. »
Il agrippe les épaules d’un des deux hommes. Répète « Forcément ! » L’homme le repousse sans violence.
« Eh, mon petit père, faut nous laisser travailler. Ne vous inquiétez pas. Tout sera bientôt réparé. Calmez-vous ! »
Le manteau d’Ernest s’est entrouvert. Une lueur bleutée frappe l’homme qui vient de lui parler. Celui-ci recule effrayé et se plaque contre le mur. Qu’a-t-il vu ? L’autre ouvrier réagit. Il sort un sifflet de sa poche. Souffle dedans. Le signal stridulant fait se retourner plusieurs employés qui n’arrêtent pas leur marche rapide.
Ernest s’enfuit. Personne ne cherche à l’intercepter. La voix dans les hauts parleurs derrière lui continue de déverser sa litanie.
De nouvelles personnes se sont engagées dans la rue. Ernest se coule dans le flot, adaptant sa marche. Il ne peut pas revenir dans son singlapt, il devrait aller à contre courant.
« Mon bureau. Là-bas je suis au calme, se dit Ernest. »
Cette pensée le tranquillise. Il rejoint sans difficulté son bâtiment. Les portes sont ouvertes. Monsieur Patère n’est pas là à guetter les retardataires, l’air faussement absent. Ernest ralentit sa marche à mesure qu’il descend vers le 3ème sous sol. Il sent un picotement sous le manteau. À l’endroit où l’accroc s’est agrandi. Il n’ose regarder.
Ils sont maigres, meurtris, las, harassés. Qu'importe !
Là-haut chante pour eux un mystère profond.
A l'haleine du vent inconnu qui les porte
Ils ont ouvert sans peur leurs deux ailes. Ils vont.
Les paroles du livre. Elles surgissent sans qu’il s’y attende. De qui parle ce texte ?
A suivre